Lettre 003 : Cher Père Noël

Lettre 003

14 novembre 2021

Cher Père Noël,

Il faut que je te raconte ma mésaventure de la semaine. Je sais que je ne devrais pas en faire tout un fromage. Mais avoue que pour faire preuve d’une malchance pareille, c’est bien que j’ai l’époisses qui me colle à la peau.

J’étais tranquille, j’étais peinarde, accoudée à ma Renault. Ben oui, j’attendais ma livraison au drive du général (Leclerc). Soudain, j’ai reçu un appel d’un numéro inconnu et non masqué. Ce qui en cette période, pas si virale, de virus n’est pas vraiment sérieux. Bref, je décroche et la voix qui prononce mon nom sonne tel le glas à mon oreille. Tu l’auras deviné, il s’agissait de La belle-grand-mère adorée alias Le Diable s’habille en Damart. 

Après une rapide prière adressée à sainte Patience, j’ai réussi à me concentrer sur les propos inintéressants à souhait de mon interlocutrice. Elle a évidemment commencé par m’annoncer l’imminence de son décès. Ce à quoi je n’ai pu me retenir de répondre par un tonitruant : « Encore ?! ». J’ai plaqué ma main si vivement contre ma bouche que j’ai failli avaler mon masque. En même temps, il faut me comprendre. Cela fait treize ans que j’ai intégré cette famille et au moins tout autant que la grand-mère n’en finit plus de crever. Ça c’est de la crevaison lente !

Sur un appel d’une durée infiniment longue d’une minute et des poussières, reconnaissons qu’elle a pris le temps de demander de mes nouvelles, mais pas celui d’écouter la réponse. Elle n’a pas hérité de son surnom pour rien.

Cher Père Noël, sache qu’elle n’adresse plus la parole à mon époux, son petit-fils. Je fais donc office de colombe suisse messagère entre les deux camps, sauf que j’aimerais bien que l’on me fiche la paix. L’aïeule crie à qui veut l’entendre… MAIS PERSONNE NE T’ECOUTE, PUTAIN ! (Respire Mél, respire…) Hum… donc, je disais qu’elle répète sans cesse que sa descendance ne prend plus de nouvelles. Sauf qu’en réalité, c’est elle qui ne décroche pas le téléphone lorsqu’elle voit le numéro de L’homme qui valait trois dinars s’afficher. L’ancêtre fait du boudin. Remarque, peut-être qu’accompagné de racines de pissenlit ce plat fait führer en enfer.  

Puis, le boudin ça la change des topinambours. Parce que pendant la guerre… gnagnagna… y’avait que ça à manger… gnagnagna… du coup elle était encore anémiée dix ans après l’armistice… gnagnagna. Limite c’est elle qui du bas de ses deux ans et demi a libéré la France en balançant des topinambours dans les yeux des Chleuhs. Quand elle commence sa sérénade, y’a plus qu’à sortir les violons et tenter de se faire hara-kiri avec l’archet pour échapper au supplice.

Mais revenons-en à mon calvaire. Toujours sur le parking du général, j’en ai pris pour mon grade. Je suis rhabillée pour l’hiver jusqu’à la collection 2033-2034. L’employé du centre commercial a eu tellement pitié de moi, qu’après avoir déposé les courses dans le coffre de la Clio, il a fait les niveaux et nettoyé le pare-brise. Quand j’affirme que cette minute était extrêmement longue, je n’exagère point. 

Petit Papa Noël, je sais que tu n’es pas choqué par mes propos, car toi qui es omniscient, tu ne la connais que trop bien. J’imagine ta souffrance dès que tu trouvais au pied du sapin, dans une petite assiette en porcelaine… des sablés au topinambour rances. 

Cher Père Noël, je dois te laisser, il faut que je me rende en ville afin d’acheter le cadeau de Noël que nous allons envoyer à la belle-grand-mère adorée. J’hésite encore entre une boîte de rustines et une bombe anti-crevaison.

Des câlins tout plein !

A un de ces jours !

Mél.

Crédit photo : Jill Wellington sur Pixabay.

Publié par melaniebonnotauteure

Auteure et chroniqueuse littéraire.

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